| publié le 17 juin 2007 |
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L’impact du climat sur la minorité
Apparemment les jeunes afghans mûrissent plus vite lorsqu’il fait beau et chaud, sinon comment comprendre la volonté de réduction, voire même d’arrêt, du dispositif d’accueil, d’hébergement et d’insertion mis en place depuis décembre par la DDASS.
Si le nombre des jeunes mineurs qui arrivent dans le 10ème a diminué, les conditions en Afghanistan, en Iran ou au Pakistan laissent penser qu’il est peu probable que ce flux s’arrête.
272 mineurs ont été repérés dans le 10ème lors des maraudes du collectif depuis décembre. FTDA en aurait hébergé environ 280 (il n’y en avait plus qu’une vingtaine fin mai). On peut penser que le nombre total de mineurs passés à Paris durant cette période est de l’ordre de 300.
Décembre 50
Janvier 87
Février 50
Mars 43
Avril 18
Mai 24
Peu ont décidé de rester en France et 80% de ceux qui le souhaitaient ont été déclarés majeurs. Même la possession d’un document officiel prouvant leur minorité ne semble plus être une garantie d’être pris en charge par l’ASE de Paris. Par conséquent ils ont été plusieurs à nous demander des adresses d’associations en province, espérant y être mieux accueillis.
La DDASS et l’ASE mettent la pression sur FTDA « mineur ».
Il faut aller plus vite dans la procédure. Mais les trois semaines généreusement accordées ne permettent pas à ces jeunes d’être en confiance, d’avoir les informations nécessaires et donc de prendre une décision grave qui engage leur futur.
Il faut également être plus « sélectif » et déterminer au faciès, place du colonel Fabien ou dans le meilleur des cas dans les bureaux, la minorité du jeune. Exercice dangereux car cette décision au faciès, surtout lorsque les jeunes arrivent fatigués par leur voyage, n’a aucun sens.
Plus d’importance devrait être donné aux entretiens, à l’histoire et au parcours du jeune, comme cela est fait en Angleterre. Mais pour cela il faudrait que les moyens nécessaires soient mis à la disposition des associations, que davantage de moyens humains permettent une véritable prise en charge socio-éducative de ces mineurs isolés étrangers. Ne faut-il pas prendre le risque d’héberger temporairement un jeune majeur plutôt que de laisser un mineur à la rue ?
Etre mineur n’est pas plus facile à Calais où un jeune afghan, malgré ses déclarations devant la police et le juge des libertés, a failli être expulsé en Allemagne. L’intervention de FTDA, en urgence un samedi, après une discussion avec le Collectif, a permis d’arrêter la procédure et le jeune, après expertise médicale, a été déclaré mineur.
Et que dire d’un document remis à un jeune par la PAF de Nice dans lequel on lui signale qu’il a 7 jours pour quitter le territoire par ses propres moyens tout en indiquant comme année de naissance 1991, soit 16 ans !
La situation ne semble pas très bonne non plus dans les pays nordiques d’où plusieurs jeunes sont revenus. Leur minorité semble ne pas avoir été reconnue et ils sont partis avant d’être expulsés en Grèce où ils avaient leurs empreintes enregistrées. Une discussion avec un responsable d’une organisation suédoise (SWERA : Swedish refugees aid) indique que la Suède est en train de réfléchir à l’utilisation de l’expertise osseuse.
Les réfugiés grands perdants de la coupe européenne de ping-pong
De mois en mois les histoires se ressemblent et se répètent.
Après 5 ans en Angleterre où il avait demandé l’asile, un afghan a été expulsé vers Kaboul où il aurait fait l’objet de menaces. Il est maintenant de retour et se demande où aller pour faire une nouvelle demande d’asile. Nouvel essai pour aller en Angleterre, mais arrêté à Douvres il a été renvoyé en France.
Un autre fuyant les talibans a demandé l’asile aux Etats-Unis avant d’être renvoyé en Afghanistan il y a trois ans. Arrêté, il a réussi à s’enfuir d’un hôpital pour essayer de retrouver sa famille. Certains de ses parents ont été tués et lui-même était en danger. De retour en Europe, il est parti en Belgique où il a demandé l’asile avant de revenir en France.
Et toujours des expulsions vers la Belgique, l’Italie, la Grèce.... Mais aussi des expulsions de Norvège, de Suède, d’Allemagne...avec retour en France avant de tenter sa chance ailleurs, peut-être en restant clandestin.
Le passage en Angleterre semble difficile actuellement. La situation à Calais ne s’améliore pas et la police multiplie les interpellations, les mises en rétention. A Nortkerque, où se situe la deuxième « jungle » (ces fameux « bois » où se terrent les exilés), l’accès à l’aire de l’autoroute a été rendu plus difficile. Les rumeurs d’expulsion, heureusement infondées, se multiplient.
A Paris, malgré quelques interpellations gare de Lyon, gare du Nord ou boulevard St Martin, ou au canal lors de bagarres, et une présence plus fréquente de la police place du Colonel Fabien ou près du square Villemin, la situation reste encore calme.
Voyant leur possibilité d’aller ailleurs se réduire, plusieurs exilés envisagent de demander l’asile en France, d’autant plus que certains viennent d’obtenir leur statut de réfugié et le nombre de demandes semblent avoir effectivement augmenté. Mais elles n’interviennent souvent qu’après des tentatives à partir de Calais et donc dans la plupart des cas après leur arrestation et la délivrance d’un APRF qui conduira à une procédure prioritaire.
D’autres rêvent encore des pays scandinaves, du Canada (surtout après la rumeur non confirmée sur une décision d’accueil massif de réfugiés afghans, rumeur qui avait déjà couru l’an dernier à Calais), de l’Islande, ou de la Légion Étrangère.
Les empreintes restent le cauchemar des exilés et le nôtre. Mais comment savoir si la Lituanie a transmis les empreintes dans Eurodac ? Comment leur répondre avec certitude sur le risque de voir leurs empreintes ressortir ?
Plusieurs exilés dont un frère, un oncle ou une grand-mère sont des réfugiés statutaires dans des pays européens (Angleterre, Norvège, Allemagne) se posent la question de la possibilité de demander l’asile dans ces pays même si leurs empreintes ont été prises ailleurs. Utiliser la clause humanitaire de la convention de Dublin ou les possibilités de regroupement familial (difficile vu la définition restrictive de la famille) est peut-être possible. Nous leur avons conseillé de demander à leurs parents de se mettre en rapport avec des associations d’appui aux réfugiés dans leur pays d’accueil pour envisager les démarches à faire, les documents à produire là-bas comme ici.
Pour un jeune de 15 ans dont le frère est en Angleterre, nous avons pris des informations auprès des associations anglaises et nous les avons transmises au frère pour qu’il commence les démarches.
En attendant les quais du canal St Martin se remplissent
Ils sont de plus en plus nombreux à dormir la nuit sous le pont Louis Blanc. Cette situation va s’aggraver avec la réduction annoncée, puis l’arrêt du plan d’urgence hivernale.
Les tensions se multiplient autour des tentes et plusieurs bagarres ont eu lieu. Certains exilés, perdent espoir et sont à la dérive.
Les plaintes des riverains semblent également augmenter et la tolérance envers les exilés installés là depuis juin dernier risque de s’arrêter. Il est à craindre que dans les semaines à venir des mesures soient prises contre eux.
Mais si les bus Atlas et l’hébergement d’urgence à « La Boulangerie » s’arrête, où pourront-ils aller ? Les mesures de relogement jusqu’ici proposées aux SDF du canal semblent inadaptées à cette population migrante.
Et toujours des prédateurs
Autour des exilés, profitant de leur détresse, tournent encore des personnes qui cherchent à profiter de la situation. C’est le cas de ce Pakistanais qui se fait passer pour un commissaire de police en mission secrète contre les trafiquants de drogue. Selon les jours il est de la police, des renseignements généraux, voire même de la CIA ! Il sert aussi d’intermédiaire pour retirer des transferts d’argent moyennant 10% des sommes reçues. Des exilés s’en sont plaints et nous ont demandé d’intervenir. Suite à une discussion place du Colonel Fabien, il a disparu mais il est toujours présent dans le square Villemin.