Communiqué
Choisir entre le racisme et l’égalité des êtres humains
| publié le 1er mars 2004 |
En poussant une fois de plus, le 24 février 2004, son cri rituel d’alerte à l’annonce d’une vague de froid, Dominique Versini, secrétaire d’Etat à la lutte contre la précarité et l’exclusion, a omis d’annoncer publiquement que son administration avait, en même temps, décidé de laisser les Afghans, les Kurdes d’Irak, les Iraniens et les autres geler devant l’église Saint-Laurent (Paris 10e). Alors que tous les autres lieux de rassemblement des SDF à Paris bénéficient du passage d’un autobus supplémentaire de la RATP chaque soir de façon à pouvoir conduire tous ceux qui le souhaitent dans les lieux d’accueil, l’église Saint-Laurent (Paris 10) en a été privée. De sources bien informées, nous savons qu’il s’agit d’une décision réfléchie destinée à pénaliser des nationalités jugées indésirables.
A l’abandon des exilés à la belle étoile, s’ajoute désormais un traitement discriminatoire.
Cette orientation illustre une nouvelle fois la doctrine inavouée selon laquelle plus les étrangers ont besoin de protection en raison de la situation dans leur pays, plus ils sont indésirables. Dans les années 90, les Algériens avaient déjà été victimes de cette trahison : plus les terrorismes faisaient de victimes, moins il y avait de visas.
Allons-nous supporter longtemps cette tragique dérive qui tire un trait sur tous les engagements internationaux pris par l’humanité au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale ? Au point que, le 29 janvier dernier, le secrétaire général des Nations unies, Kofy Annan, a accusé l’Union européenne d’« annihiler le régime de l’asile ».
Pour notre part, nous tenons aux valeurs et aux principes, parmi lesquels les éléments qui, dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, affirme très simplement que :
« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité » [1].
Et de ce fait :
« Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays » [2].
C’est notamment pour défendre l’application de cet engagement des Etats que, depuis près d’un an, la poignée de citoyen(nes) que nous sommes s’est mobilisée sur la question de l’errance et du non-accueil des exilés que les pouvoirs publics laissent dormir par terre sur nos trottoirs pour les empêcher de rester en France et pour en dissuader d’autres de venir. Notre obstination a fait tâche d’huile : une trentaine d’organisations et de paroisses ont hébergé les exilés en signe de solidarité et de protestation.
Non seulement le gouvernement fait la sourde oreille, mais le voilà désormais engagé dans la discrimination. Dans ce contexte, revient de plus en plus souvent la terrible question des exilés : « Comment demander l’asile à des pays qui nous traitent comme des chiens ? ».
A l’heure d’élections régionales et bientôt européennes, nous appelons les Français et les Européens à choisir entre le racisme et le respect de l’égalité entre les êtres humains.