par cae | publié le 12 octobre 2003 |
– Comment continuer à intervenir concrètement contre les expulsions de sans-papiers ?
– Comment soutenir efficacement les passagers inculpés ?
L’une des plus réjouissantes actions de solidarité avec les sans-papiers est l’opposition spontanée aux expulsions de ces voyageurs (souvent des immigrés en situation régulière) qui refusent de s’asseoir tant que restent présents à bord ces « passagers forcés » (souvent ligotés, bâillonnés, battus, voire drogués) et qui demandent au commandant de bord qu’il les fassent redescendre, eux et leurs tortionnaires.
Depuis plusieurs années, nous, Collectif Anti-Expulsions, avons cherché, avec un relatif succès, à développer ces actes de résistance concrète aux expulsions, d’une part en diffusant largement et en plusieurs langues un Guide pratique d’intervention aux aéroports, d’autre part en nous rendant régulièrement aux départs des avions pour parler aux passagers et aux personnels. Parmi les divers dispositifs récents de durcissement du contrôle et de la répression visant spécialement les étrangers, certains sont assez bien connus - tel le rétablissement des expulsions par charters -, d’autres le sont moins, mais en sont peut-être d’autant plus dangereux, par exemple les nouvelles consignes données à la police aux frontières de ne plus obéir systématiquement aux commandants de bord (supposés être « seuls maîtres à bord de leur avion ») ; et, complémentairement, la tentative de criminalisation des manifestations de passagers sous la forme de procès fait à 2 ou 3 d’entre eux à chaque fois, pris, comme d’habitude, plus ou moins au hasard, pour « entrave à la circulation d’aéronef » . L’Etat n’a pas trouvé mieux que ce chef d’inculpation, au nom désuet mais toujours passible de prison ferme, pour s’attaquer à ceux qui affirment leur indignation face à ces entraves à la libre circulation des hommes et des femmes que sont les expulsions, sauf à y ajouter le joker juridique usuel de l’outrage, rébellion et violence.
Dans le procès du 1er octobre concernant 3 passagers maliens (reporté au 19 novembre), Air France a participé, en se portant partie civile, à l’offensive contre les passagers.
A notre connaissance, dans les 3 derniers mois, 3 personnes ont été reconnues coupables mais dispensées de peines (ruse juridique qui permet d’affirmer que le délit est constitué sans prendre le risque d’un appel), une passagère récalcitrante a eu droit à un rappel à la loi après 24 heures de garde-à-vue, 5 autres personnes sont encore en procédure. Combien dont nous n’avons pas entendu parler… ? A chaque fois, il faut ajouter à la peine le désagrément certain causé par la perte d’un billet d’avion coûteux, l’obligation de différer le voyage, une garde-à-vue, etc.
« Fermez vos gueules, attachez vos ceintures, et laissez-nous expulser tranquille… » (J-P. Chevènement, avril 1998, N. Sarkozy, mai 2003)
L’ampleur de cette offensive montre que, contrairement à une idée reçue, les charters ne sont pas prêts de remplacer les expulsions quotidiennes sur vols réguliers, mais vont tout simplement s’y ajouter. Pour expulser en paix, l’Etat a donc besoin de la docilité des passagers réguliers et semble prêt à déployer un acharnement impressionnant contre tous ceux qui refusent de côtoyer en silence ces « expulsions discrètes ».
Chevènement l’a rêvé, Sarkozy doit le rater…
Il suffit de pas grand chose pour enrayer la machine à expulser... On se souvient que Chevènement s’était déjà inquiété de ces oppositions de passagers en 1998 : après en avoir mis 14 en garde-à-vue, il avait laissé tomber toute poursuite à leur encontre et n’a jamais renouvelé cette tentative avortée. Efforçons nous d’obtenir un recul semblable se Sarkozy.
Face à ces attaques, comment faire ?
Bien entendu, tous les partisans de la liberté de circulation et d’installation doivent soutenir les inculpés et créer le rapport de force nécessaire à leur relaxe. Mais, au-delà de cette indispensable riposte aux attaques contre l’une des rares possibilités de s’opposer concrètement aux expulsions, nous voudrions aussi profiter de ce que M. Sarkosy veut nous ôter l’une de nos armes pour voir si nous ne pouvons pas en inventer de nouvelles, plus efficaces si possible.
C’est pour cela que nous organisons ce débat public, que nous ne voulons pas n’être qu’une réunion d’information et de protestation mais aussi et surtout un moment de recherche collective de moyens de lutte efficaces.
Dimanche 19 octobre 2003, à 15 h, au CICP, 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris, M° Rue des Boulets
Collectif Anti-expulsions, rép/fax : 01 53 79 12 21